Bowinage : une reconstitution historique inédite d'un pan totalement oublié de la biographie de David Bowie. Un travail documentaire rigoureux pour rétablir la vérité sur l'influence des terrils du Borinage sur l'oeuvre du Thin White Duke.
Juin 1968 : un certain David Bowie cherche son second souffle. Son premier album sorti sous le nom de David Jones & The King Bees n'a pas rencontré le succès escompté. Quant aux singles sortis sur le label Deram (Rubber Band, The London Boys), ils peinent à trouver un écho auprès des pontes de la FM. C'est la première grosse déprime de celui qui est en train de composer l'album Space Oddity.
En plein questionnement existentiel, Bowie rencontre dans un pub de la banlieue sud de Londres l'écrivain Constant Malva, qui l'invite alors à venir passer quelques jours de villégiature chez lui, en Belgique, plus précisément à Flénu, une petite bourgade de la région de Mons. Malva était persuadé que la noirceur des terrils du Borinage offrirait à la future pop star la source d'inspiration qui avait manqué jusque là à des chansons trop naïves et enjouées.
Ce pan totalement oublié de la biographie officielle de Bowie l'a donc amené un samedi de l'été 68 à errer sur les berges de la Trouille, la rivière qui irrigue la région des charbonnages. Il y rencontre, assise sur un banc en train de réviser ses déclinaisons latines, une adolescente aux longues boucles rousses, qui n'est autre que ma mère alors âgée de 13 ans seulement. Dans un français plus qu'approximatif, il engage la conversation avec cette jeune fille dont il tombe immédiatement sous le charme mais qui repousse ses avances, encore toute farouche derrière ses épaisses lunettes de lycéenne. A l'époque, ma mère n'avait que faire des pseudo rock stars. Entre ses révisions, elle passait son temps à apprendre par cœur les écrits de Karl Marx et Rosa Luxemburg et ne jurait que par le "grand soir", celui qui quelques semaines plus tôt avait soulevé les Universités de France. Du matin au soir, elle chantait les louanges des prophètes armés et rêvait du jour où elle battrait le record du monde du lancé de pavé.
En cette belle après-midi estivale, elle tente donc d'initier le jeune Bowie aux joies de la révolution permanente. Voilà comment quelques semaines plus tard, de retour à Londres, Bowie composait son hymne Cygnet Committee, véritable appel au soulèvement des masses, qui s'étire sur plus de 9 minutes sur l'album Space Oddity. Morceau d'anthologie, Cygnet Committee dévoile un Bowie sous son meilleur jour. Si le titre s'ouvre sur un phrasé tout en retenue, il évolue vers un final dramatique aux accents gospell, qui traduit à la fois la détresse et la détermination de Bowie qui clame : I will fight for the Right to be Right / I will kill for the Good of the Fight for the Right to be Right.
On sent bien évidemment l'influence de ma mère dans ces quelques lignes : la révolution permanente. L'allusion à la révolution est moins évidente sur la pochette de l'album Space Oddity. Par contre, il est impossible de passer à côté de la permanente.
A écouter : Cygnett Committee
A écouter : Cygnett Committee
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