Les immanquables
31Knots - Talk Like Blood
Oui, je sais, cet album est sorti fin 2005. Et alors ? C'est quand même ce disque que j'ai écouté pratiquement tous les jours, alors que l'Italie se hissait vers la finale de la coupe du monde. Je le considère donc comme un des incontournables de 2006. Cet album, c'est une mine d'or. Les White Stripes ont ressuscité le rock ? Et mon cul, c'est du poulet ? Depuis que j'ai découvert 31Knots, mes oreilles bandent. Chaque chanson est un modèle d'équilibre entre maîtrise mélodique et dérapages chaotiques. Le tout tapisse mon canal auditif alors que les morceaux défilent. La première plage, City of Dust, sonne comme une vieille rangaine post-industrielle qui vient marteler le cerveau à coups de rythmes synthétiques. Comme pour vous vider la tête avant d'assister au grand show. Commence alors Hearsay et son improbable basse reggae. On s'emballe et on n'a encore rien vu. Premier sommet avec Chain Reaction, ode à la démonstration d'air guitar. Deuxième sommet avec Talk Like Blood, toutes guitares en avant. Le poil se hérisse sur Busy As Bold lorsque retentit sur le pseudo-refrain un clavier sorti de nulle part. On n'a rien vu passer et le disque est déjà terminé. On saute sur la télécommande et on écrase la touche Repeat. Putain, quel pied !
Site officiel : www.31knots.com
Fink - Biscuits For Breakfast
Celui-là, je ne l'ai pas vu venir. Mais qui diable est Fink ? Un artiste britannique qui, en 2000, avait séduit la critique avec Fresh Produce, EP sorti chez Ninja Tune qui, à l'époque, nous servait un cocktail d'électro, de hip hop et de downtempo si cher à ce label. Six années plus tard, Fink se décide enfin à sortir son premier album. Et surprise, le fils prodige laisse tomber ses boîtes à rythmes pour se lancer dans la chanson folk bluesy. Ce revirement à 180° déconcerte, interpelle puis, finalement, enchante. Les chansons sont dépouillées au maximum (une guitare, une voix et parfois une timide rythmique). En moins de 40 minutes, Fink signe une production minimaliste qui ravit par sa simplicité et sa justesse.
Site officiel : http://www.finkworld.co.uk/
TV On The Radio - Return To Cookie Mountain
Honte à moi: en 2004, j'étais passé à côté du premier album de TV On The Radio. Preuve qu'il y a aussi une justice pour les incultes, 2006 nous revient avec une livraison exceptionnelle de ces poilus New Yorkais. Et cette fois-ci, ils ne m'ont pas loupé, les bougres. Rock, soul, jazz, électro, gospel, j'y retrouve tout ce que je n'osais plus attendre d'un disque de rock en 2006. Le single Province, en duo avec sa majesté Bowie, est tout simplement une des meilleures chansons entendues cette année. C'est intelligent, c'est frais et ça flingue tous les groupes de pseudo-hype-rock qui me cassent les pieds à chaque refrain, Yeah Yeah Yeahs en tête. Un album majeur de ce début de siècle.
Site officiel : http://www.tvontheradio.com/
Tool - 10,000 Days
Bizarre. En fin d'année, alors que tous les sites et magazines rock dressent leur bilan, personne ne semble se rappeler l'album de Tool. Oh, j'entends déjà les puristes d'ici : "Tool se contente de faire du Tool. C'est du déjà entendu. On reprend les mêmes et on recommence. Bla bla bla..." Pourtant, force est de reconnaître que ce 10,000 Days est une pure merveille. On y retrouve tout ce qui avait manqué au précédent Lateralus. Des hymnes comme Vicarious, The Pot ou Rosetta Stoned resteront du Tool grande cuvée. Les guitares n'ont jamais été aussi cinglantes, la voix n'a jamais volé aussi haut et la section rythmique n'a jamais été aussi puissante. C'est du Tool, ok. Mais un millésime qu'on ressortira dans quelques années, l'eau à la bouche...
Site officiel : www.toolband.com
Broken Social Scene - Broken Social Scene
Et oui: encore un album sorti fin 2005. Mais que voulez-vous? Celui-ci fut la BO de mes vacances dans le Var. Je ne pouvais pas ne pas en parler. La Dream Team du rock actuel. La voix de Lesly Feist me fait craquer. Surtout dans un tel contexte. Les arrangements sont à pleurer. L'intro évoque presque les cuivres enrhumés de Jaga Jazzist. 14 chansons et au moins 12 tubes. Et y'en a pour tous les goûts. Les productions précédentes de Broken Social Scene étaient déjà d'un niveau très élevé, mais plus intimistes, navigant souvent sur les eaux troubles du post-rock. Ici, c'est l'explosion. Un CD à écouter en voiture, toutes fenêtres ouvertes, par 32° à l'ombre. Cerise sur le gâteau: la pochette est splendide, tout comme le livret intérieur.
Site officiel : http://www.arts-crafts.ca/bss/
Bonobo - Days To Come
Une autre sortie que j'attendais de pied ferme. Bonobo m'avait régalé en 2003 avec le génial Dial M For Monkey, cocktail parfait de beats trip hop et de gimmicks jazzy. Retour du singe cette année avec cet imparable Days To Come. Les voix sont désormais de la partie, tandis que le ton général se veut plus vintage, moins électronique. On retiendra particulièrement le formidable Between The Lines, véritable machine soul à faire remuer les popotins que n'aurait pas renié la divine Sharon Jones. Reste à Bonobo à me démontrer toute l'étendue de sa classe sur scène.
Site officiel : www.bonobomusic.com
I Love You But I've Chosen Darkness - Fear Is On Our Side
Je n'aurais jamais cru dire un jour du bien d'un groupe catalogué, à tort sans doute, de "Revival New Wave". Pourtant, il faut bien admettre que ces Texans au nom aussi long que l'autoroute du soleil ont une sacrée pêche. Une basse bien grasse, des guitares aériennes à faire pâlir Interpol : que demander d'autre ? Ah si, j'oubliais, un chant qui peut passer du couplet sombre au refrain pour minettes. De la vraie power pop un peu rèche. On pourra discuter pendant de longues nuits sur la pochette. Moi, je la trouve très jolie, au risque de me la jouer fleur bleue...
Site officiel : http://www.chosendarkness.com/
Liars - Drum's Not Dead
Ah, voilà un disque difficile. Pour être tout à fait franc, je ne suis toujours pas parvenu à écouter cet album d'une traite sur mon lecteur mp3. Dans le salon, l'espèce de transe tribale post-punk passe sans problème. Mais dans le train, avec les écouteurs bien calés dans les oreilles, totalement coupé du monde, après 5 ou 6 titres, j'en arrive à vouloir arracher un oeil à mon compagnon de voyage. Ce qui me plait le plus dans cet album, c'est l'audace de la démarche. C'est totalement à contre-courant de tout ce qu'on peut entendre pour le moment: finis les riffs de guitare, au diable la basse et qu'on me vire cette batterie. Chanter ? Pour quoi faire quand on peut se contenter de brailler, de crier et de murmurer ? Le pire, c'est que c'est diablement efficace, mais hautement dangereux pour la santé mentale. En live, la musique de ces trois possédés prend toute sa splendeur. Mais sans les boules Quies, c'est du suicide. J'ai hâte d'entendre leur prochain disque. Avec Liars, on peut vraiment s'attendre à tout.
Site officiel : http://www.liarsliarsliars.com/
Woven Hand - Mosaic
Woven Hand, c'est comme le Canada Dry. Ce sont les mêmes mecs que 16 Horsepower, ça sonne (sonnait?) comme 16HP, mais ce n'est pas 16 Horsepower. La déception se fait surtout ressentir sur scène car le fan de la première heure ne peut que déplorer l'absence de magie qui faisait jadis leur force. Quiconque a eu la chance d'assister à la reprise de Heart & Soul de Joy Division en live par 16 HP sait de quoi je parle. Néanmoins, avec cette dernière galette, le groupe de David Eugene Edwards semble de nouveau aller de l'avant. Bien décidés de tirer définitivement un trait sur le passé, ils s'offrent avec Mosaic leur album le plus mystique, presque lithurgique, dans son acceptation la plus middle west qui soit. C'est très sombre, ça sent les vieux trucks du Kentucky et l'Amérique des années 40, mais pour peu, on se mêlerait bien volontiers à cette communion d'une autre époque. Et décidément, on nous aura gratifié de bien belles pochettes cette année...
Site officiel : http://www.wovenhand.net/
Danielson – Ships
Voilà un drôle de coco que ce Danielson. Son univers musical nous replonge dans les comédies musicales de notre enfance, avec ses chœurs interprétés par de petites têtes blondes. Personnellement, j’y retrouve un peu l’univers de Labyrinthe avec David Bowie. Plus vicieux, je pense même au Voyage de Marie-Rose par une Chantal Goya qui aurait acheté ses champignons dans une arrière-boutique de Maastricht. Alice au Pays des Merveilles n’est pas bien loin non plus. Mais faire écouter ça à des gosses, c’est leur assurer de longues nuits de cauchemars. Bien enfoncé dans son délire, Danielson se produit toujours sur scène déguisé en… arbre.
Site officiel : http://www.danielson.info/
Les poids lourds
Sunn O))) + Boris - Altar
Les encapuchonnés de Sunn O))) nous en avaient déjà mis plein les tympans avec le très dispensable Black One, sorti également cette année, compilation d’infra-basses interminables et de borborygmes en tous genres qui ont dû déchirer bien des membranes. De son côté, les japonais de Boris avaient fait mouche avec Pink, un album de rock sur-vitaminé, fait de riffs de guitare assassins et de litres de sueur. Associés le temps d’un album, les deux groupes parviennent à tirer le meilleur de leur deux univers en six titres oppressants, lourds, sombres et terriblement lents. Asphyxie garantie pour les oreilles non averties. La BO parfaite pour le prochain Halloween.
Site officiel : http://www.southernlord.com/press/sunnborisaltar/
Isis – In The Absence of Truth
Depuis la fin des années 90, Isis s’est créé un son reconnaissable entre mille, jouant sur deux tableaux à la fois: les longues abstractions post rock à la Mogwai et la fureur d’un rock 10 tonnes influencé tant par Neurosis que par les Melvins. Jusqu’alors, on pouvait reprocher à Isis d’hésiter entre les deux styles sans vraiment parvenir à ériger les passerelles qui mèneraient d’un univers à l’autre. C’est désormais chose faite avec cet opus impeccable, plus chanté qu’à l’accoutumée. Les morceaux plongent lentement mais sûrement dans les tréfonds de nos pires angoisses avant de laisser les éléments se déchaîner dans un tonnerre de guitares et de rugissements. A manier avec prudence.
Site officiel : http://www.isistheband.com/Home.aspx
Napalm Death – Smear Campaign
Les webzines et blogs plus « généralistes » rechignent souvent à chroniquer les productions les plus radicales. Pourtant, Napalm Death mérite cent fois plutôt qu’une qu’on s’attarde à ce diabolique Smear Campaign. Rappelons que Napalm Death s’est illustré à partir des années 80 en inventant un style musical baptisé grind core, variante ultra rapide et totalement cacophonique du death metal. Les premiers albums, cultes, de ce groupe britannique se « limitaient » à un tohu bohu pas possible de hurlements, de crissements guitaristiques et de roulements de batterie. L’écoute de leurs premiers disques (qui ne duraient pas plus d’une quinzaine de minutes) s’apparente pour beaucoup à une séance d’automutilation psychologique, tant il est pratiquement impossible de percevoir la moindre note. Depuis lors, n’en déplaise aux fans de la première heure, Napalm Death a mis un peu d’eau dans son vin et s’acharne, depuis plusieurs années, à sortir des disques plus « écoutables », balayant tout ce qui traîne dans le registre du hardcore le plus extrême. La production est plus soignée, les riffs de guitare sont plus tranchants qu’une lame de rasoir, mais le ton n’a pas changé. Ça gueule très fort ! Résultat : cette cuvée 2006 est sans doute un des meilleurs albums du genre, une tornade qui renvoie le tsunami en Indonésie au rang de pipi de fourmi. Tympans en papier crépon s’abstenir.
Site officiel : http://www.enemyofthemusicbusiness.com/
Les inclassables
Nick Cave & Warren Ellis – The Proposition Original Soundtrack
Passé pratiquement inaperçu chez nous (aucun distributeur belge n’a osé programmer ce film en salle, le jugeant trop violent), The Proposition est un western australien co-scénarisé par Nick Cave. Pour ne rien faire à moitié, l’auteur des Murder Ballads s’est associé à Warren Ellis, le violoniste des Bad Seeds, pour composer la bande originale de ce long métrage que je n’ai pas encore eu la chance de voir. Mais écouter la BO en dit beaucoup sur l’ambiance du film : plus noir que ça, tu meurs. Du Nick Cave au sommet de son art (et décidément bien productif ces derniers temps !), alternant chansons dépouillées et longues variations instrumentales.
Site officiel : http://www.nickcaveandthebadseeds.com/
Richard Cheese – The Sunny Side of The Moon
Dire de Richard Cheese qu’il serait le nouveau Mike Flower’s Pop est un peu court. Crooner américain, Cheese se complait à reprendre des grands succès actuels à la sauce big band. Il multiplie les albums aux titres aussi hilarants que I’d Like a Virgin ou Aperitif For Destruction. L’entendre battre des mains sur Rape Me ou faire retentir les cuivres sur Creep est un régal. Le décalage total entre la musique enjouée et les textes au vitriol de Nine Inch Nails est succulent. Ce double best of reprend les meilleurs titres de Richard Cheese, qui n’était jusqu’alors pas distribué en Europe. Vivement qu’un programmateur ose l’attirer de ce côté de l’Atlantique.
Site officiel : http://www.richardcheese.com/
1 commentaire:
Waw, tu m'as presque donné envie d'aller acheter le dernier album de Napalm Death...
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