dimanche 20 juillet 2008

Rock Herk 2008 : il est où, mon festival ?

Les festivals rock, j'en ai plein les bottes. Mon premier, c'était en 96, à Torhout. Depuis, je ne compte plus les Pukkelpop, les Dour, les quelques Werchter, les Feest in het Park, les MarktRock, les Primavera, les Main Square Festival, les Ardentes et les que sais-je encore.

Ces dernières années, la trentaine approchant à grands pas, j'ai commencé à me lasser de ces festivals où on cuve ses bières dans une tente qui n'est plus tout à fait étanche, où on dort en tout 10 heures sur 4 jours, où on bouffe des kilos d'Aïki Noodles, où on carbure à la sangria empilée par jerricans de 5 litres dans le coffre de la voiture, où on prie le seigneur Immodium pour ne pas devoir utiliser les Katty Toilettes et après lesquels on crache des trucs tout noirs pendant une semaine.

La der des der
Depuis au moins trois ans, après chaque festival, je jure qu'on ne m'y reprendra plus. Et pourtant, chaque été, je me laisse tenter par une affiche plus rock que roll.

Cette année, c'est Rock Herk qui m'a tapé dans l'oeil. Une très belle affiche et un tarif plus démocratique que ça tu meurs : zéro euro. Un petit coup de fil à mon pote M. (qui conservera l'anonymat par respect pour sa mère qui le croit toujours aussi sage que le jour de sa communion) et nous voilà partis pour Herk de Stad, petit bled paumé à une heure de route de Bruxelles.

La consigne est claire : on plante la tente, on pieutera sur place. Pas besoin de faire gaffe à la bière de trop, on ne reprendra pas le volant ce soir. Attention toutefois à la sortie de route : M. et moi, quand nous sommes lâchés dans la nature, avons une fâcheuse tendance à foirer nos festivals, emportés par un enthousiasme bibitif insatiable. A notre palmarès, on épinglera :

- la première édition des Ardentes qui s'est résumée à un stand bacardi où l'on servait les mojitos à la cruche et qui s'est terminée par un dodo collectif à un arrêt de bus ;
- un Primavera qui s'est achevé pour M. au service des urgences, avec un pied dans le plâtre et l'assurance d'être déclaré persona non grata dans tous les hôpitaux de Barcelone ;
- quelques concerts dont je n'ai plus le moindre souvenir (Bonobo, les Melvins, Sonic Youth, Jaga Jazzist, etc.) ou si peu (Jamie Lidell).

EPO
Hier, donc, à Rock Herk, on comptait passer une étape de moyenne montagne tranquille. On débarque sur le site vers 16h, on repère les lieux et on fonce à la caisse pour un achat de 20 tickets boissons. 10 bières chacun, ça nous permettra de passer un festival peinard, bien calé au milieu du peloton qui nous amènera pépère jusqu'au concert d'Amen Ra programmé à 23h45 et qui sera le clou de la soirée avant le sprint final.

2+2=5
Seulement voilà, mon néerlandais était-il particulièrement innovant hier ? Je n'en sais rien. Mais quand j'ai commandé mes 20 tickets boissons, la jeune demoiselle qui tenait la caisse s'est emmêlé les pinceaux et m'en a donné... 40. Si ça, ce n'est pas un signe du destin !

40 tickets, ça fait 20 pintes chacun, ce qui bouscule sévèrement nos plans. Nous aurions pu les échanger, boire du coca, offrir des tournées au premier quidam. Ou alors nous pouvions nous mettre directement en danseuse, passer les premières bosses sur le grand plateau et... advienne que pourra. Dont acte. C'est parti pour une étape en free style.

Future Of The Left entame son set à 16h45. C'est fort, c'est puissant, passant des guitares au clavier, du clavier à la guitare. Sur le final, on retrouve le côté déglingué de l'époque McLusky, avec une mise en scène à deux balles où un rasta avec des dreadlocks jaunes et une combinaison de garagiste démonte le matériel avant la fin du morceau.

M. et moi faisons des allers-retours jusqu'au bar. C'est de la Stella mais ça passe encore.

L'avenir de la gauche
D'un oeil distant, on verra ainsi défiler Drumcorps, Ritual, Cutting Pink with Knives, Red Sparowes, Battles et sans doute d'autres. Du bar, on ne distingue rien de vraiment foudroyant. Le tas de tickets boissons s'amenuise lentement mais sûrement, le regard se fait plus vitreux, le pas plus hésitant, la diction moins claire.

L'alccol aidant, les rencontres s'enchaînent, les conversations sans queue ni tête se multiplient. Tiens, une collègue.
Tiens son copain.
Tiens, le rasta qui démontait la scène de Future Of The Left et qui s'avère être un vrai moulin à paroles ; ça tombe bien, j'ai l'alcool polyglote. "You're a star, man!"
Tiens un autre mec qui cause anglais. Salut moi, c'est AL. T'es qui toi ? J'ai rien compris, c'est pas grave. Tu bois une bière ?

McLusky
Il m'a fallu un bon quart d'heure pour percuter que je bavardais avec le batteur de Future Of The Left, soit le batteur de feu McLusky, groupe que je situe parmi les légendes, au même rang que les Pixies, 31knots ou les Melvins. Et on était là, tranquilou, en train de taper la discute comme si de rien n'était, en se mettant des claques dans le dos. J'aurais pu lui parler de mille trucs. Mais le tas de tickets diminuait à vue d'oeil et je suis resté calé en mode Repeat : "Alors fieu, McLusky, vous vous reformez quand?" "Ok, mais vous vous reformez quand ?" "Et au fait, vous avez pensé à vous reformer ?"

La fringale
Tiens, ça fait au moins 15 minutes qu'on n'est plus allé au bar. Je n'irais pas jusqu'à dire que j'ai soif, mais bon... Allez, hop, on remet une tournée à ces messieurs. Ah merde, on les a perdus. Bon, ben tant pis, on va se boire toutes ces bières à deux. Puis on va bouffer une pizza. Puis des raviolis chinois à la sauce aigre douce. Puis une pitta. Puis une bière. Une bière, c'est deux tartines. Faut éviter la fringale.

Red Sparowes était chiant. Battles aussi. Nous, on descendait les cols sans les mains, en zigzagant entre les obstacles, le bidon aux lèvres. Et ce qui devait arriver arriva : la chute en sortie de virage. Les raviolis aigres doux repassent à contre-sens. Je perds l'équilibre. "Désolé M, je vais me pieuter, je ne tiens plus debout. Allo ? M ? T'es où ? Finalement je me sens mieux, je reviens. Désolé M, mais je suis à plat. Je vais vraiment pieuter cette fois."

Une bonne heure pour retrouver la tente. Envie de dormir là, dans la boue. Aaaaah, voilà mon sac de couchage. Je termine mon festival dans la voiture balais, contrôlé positif. Je ne peux pas jurer avoir tenu jusque 22h. Abandon après la première difficulté.

Alcotest
Réveil à 7h du mat.

- Alors M ? C'était comment Amen Ra ?
- J'en sais rien. Black out total.
- Tu les as vus ou pas ?
- Je sais que j'étais juste devant la scène 5 minutes avant le début. Puis, plus rien.
- Et Roni Size ?
- Pareil.
- On a fini tous les tickets ?
- Non. Il m'en reste deux. Et toi ?
- Aucun. Mais bon, on n'a pas tout bu tous seuls. On a payé des bières au batteur de Future Of The Left et à ses potes.
- On leur a mis une tournée, mais comme on ne les retrouvait plus, on a tout bu.
- Ah ouais, c'est vrai. J'avais oublié.

Je sors de la tente et je marche sur quelque chose de dur. Cool: mes clés de bagnole ! ça m'aurait fait chier de devoir rentrer à pattes. Il y a un dieu pour les soiffards. On remballe tout. Je souffle dans l'alcotest avant de reprendre le volant. Négatif. Tant mieux. On s'arrête au premier restoroute pour prendre un petit déj. Du pain, du fromage, du jambon, du café. Puis des oeufs, puis du bacon. Puis du pain, puis du fromage, puis du café. Sous les yeux éberlués de la serveuse qui n'a jamais vu de tels estomacs sur pattes. Il y a avait du liquide à éponger. Trois petits déjeuners en terrasse auront retapé l'ogre qui sommeillait en nous.

- C'est fini, hein M ? On va arrêter les festivals, hein ? C'était celui de trop, n'est-ce pas ?
- C'est ce qu'on dit depuis trois ans. On en reparlera. Au fait, ça ne te botte pas le Pukkelpop ? Il y aura Amen Ra.








A regarder : Future Of The Left

lundi 14 juillet 2008

Life Beyond Mars

Voilà un beau cadeau pour l'été. Après les albums de reprises de Prince (Controversy) et de Radiohead (Exit Music), le label Rapster Records s'attaque cette fois à l'oeuvre monumentale du dieu Bowie.

Tout comme pour la pochette, ce disque fait preuve d'un bon goût particulier dans la sélection des artistes et des titres couverts. Au générique forcément très éclectique, on retrouve ainsi Au Revoir Simone, Susumu Yokota ou encore Carl Craig. On fait difficilement plus varié.

En ce qui concerne la playlist, peu de "tubes" au sens pur et dur, hormis Ashes to Ashes et une version dépouillée à la contrebasse de Life On Mars? Pour le reste, ça puise pas mal dans la trilogie berlinoise (même les instrumentaux), la BO de Labyrinth et même les albums plus récents (Looking For Water).

Tout l'intérêt de ce genre de disque, c'est évidemment d'offrir une lecture différente du répertoire de Bowie, sans véritable formatage dans un style ou dans l'autre. Du coup, ça flingue dans tous les sens et chaque morceau est une agréable surprise, passant de l'électro-folk, à l'ambient, du free-jazz à la pop doucerette.

En tant que fan absolu du Thin White Duke, je ne peux que me prosterner. Mais il ne faut pas nécessairement être conquis d'avance pour y trouver son compte : tous les amoureux d'aventures musicales culottées devraient déguster ce disque avec un réel plaisir.

La bonne nouvelle de l'été.

A regarder : Oh! You Pretty Thing par Au Revoir Simone



Les liens intéressants :
Le site officel : http://www.lifebeyondmars.com/ (avec un morceau bonus à télécharger gratuitement)
Rapster Records : http://www.rapsterrecords.com/
Le site de David Bowie : http://www.davidbowie.com/

dimanche 13 juillet 2008

Le feuilleton de l'été : trésors de brocantes, épisode 1 / L'amour et la vie

Faites la queue

Un été sans feuilleton, c'est comme un Tour de France sans EPO, ça manque de piquant. Après le succès intergalactique des rediffusions des meilleures prestations live de Nulle Part Ailleurs (Souviens-toi l'été dernier, tatatam), l'été 2008 sera consacré à la plus belle des activités dominicales, j'ai nommé LES BROCANTES.

Un dimanche ensoleillé, un short, des tongs, un billet de 5 euros dans une poche, un stand Leffe, du fromage d'abbaye, qui oserait dire qu'on vit une sale époque ? Les brocantes, c'est ce qu'on a inventé de mieux depuis le chewing gum qui lave les dents. On y trouve de tout : un pare-choc de Simca 1000, des bigoudis anciens, une collection preque complète de Pif Gadget, des tapisseries de scènes de chasse, l'inévitable peinture de l'enfant triste, des machines à écrire, un Commodore 64, une MasterSystem avec Wonderboy, des bottes de Chewbacca, une valise contenant des romans érotiques des années 50 et, surtout, des caisses complètes de vinyles.

Quand, comme moi, on aime autant l'objet que son contenu, les caisses de vinyles, ça devient vite la caverne d'Ali Baba. En moyenne, sauf chez les exposants spécialisés, il faut compter un disque intéressant pour 99 bouses. Autrement dit, avant de tomber sur un album de Talking Heads ou la BO d'Ulysse 31, il faut se farcir à la pèle mécanique les grands classiques du brocanteur que sont :

- Cloclo, Sardou, Johnny et Luis Mariano
- les compilations des grands standards de l'accordéon
- les marches militaires, musiques de gendarmerie et chansons d'étudiants
- les ultratops en tous genres façon Discover Bastos

Toujours est-il que, avec une once de persévérance, on arrive toujours à dégoter de petites perles qui se négocient aux alentours de l'euro.

Cet été, je te propose donc une petite virée dans ma collection privée (hum...) acquise pour quelques pièces auprès de vendeurs pressés de se débarasser de ces énormes objets qui encombraient leur grenier.

Dimanche 6 juillet : brocante de la Gare de Nivelles

La pêche est pauvre en ce dimanche matin. Le portrait d'un mètre sur deux d'Albert 1er, titrant Marche-lez-Dames 1934, ne pourrait en aucun cas se marier avec la déco de mon salon. Dans les bacs, du Serge Lama, du Julien Clerc période "Cheveux longs, idées courtes", de la Sylvie Vartan, de la Sandra Kim, l'intégrale d'Hugues Aufray, mais rien de bien sérieux à se mettre sous la dent. Un des derniers exposants, plus proche du sapin que du berceau, ne m'inspire aucune confiance avec ses trois caisses qui ne mettent en évidence que de la musette.

Allez, on prend son courage à deux mains, on fouille et BINGO. Pour 1,50 euros, le vieil homme me cède trois disques au look infernal, dont le premier va nous occuper aujourd'hui :

L'amour et la vie, la conception et la naissance expliquées aux enfants

Un cours d'éducation sexuelle, pressé sur vinyle par le Service de documentation conjugale de Grenoble. Doux Jésus, la pochette est splendide, représentant la famille unie dans la grande tradition des publicités pour Kinder Surprise des années 80 :

"Mais voyons, Michel, tu sais très bien qu'on a toujours Kinder Chocolat à la maison..."


Au début, je pensais qu'il s'agissait d'une prose catho-conservatrice, usant et abusant des clichés des fleurs, du pollen et des abeilles.

Le disque s'ouvre sur une chanson kitsch au possible ("Il y a deux roses" de Pierre Louki) qui parle des belles fleurs rouges qui poussent dans le jardin de maman. Maman qui reprend justement le micro accompagnée de papa, "pour expliquer à Claire et Jean, rassemblés dans le salon, le mystère de la vie."

Je craignais le pire. Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant la suite : certes, on n'y appelle pas une couille une couille, mais le langage reste franc, factuel, direct et ne cherche pas à embrouiller les gosses avec des pirouettes sémantiques. Pour les roses et les choux, on repassera.

Morceaux choisis :

- Maman, comment fait le bébé pour sortir de ton ventre ? - Le corps de la maman est équipé au bas du ventre d'une sortie spéciale qui permet au bébé de naître. Ta soeur a également cette sortie, mais en plus petit.

- Toi aussi, plus tard, tu seras grand comme papa. Tu seras plus musclé et ta voix deviendra plus rauque. Un jour, tu auras ce qu'on appelle des écoulements de sperme. A partir de ce moment-là, tu auras très envie de tomber amoureux d'une fille.

Par moments, le ton très neutre du narrateur fait même carrément peur. La voix est celle de Jean Negroni, un narrateur dont l'organe a déjà sévi sur de nombreuses séries. Impossible de savoir si c'est lui qui doublait Rod Serling au début des épisodes de The Twilight Zone, mais franchement, ça ne m'étonnerait pas. D'où ce petit côté effrayant quand Negroni nous parle de la verge ou des testicules : on a presque l'impression que les Martiens débarquent, effet renforcé par une petite musique de fond angoissante.

La face B s'ouvre sur Voir" de Jacques Brel. Après nous avoir détaillé les organes génitaux, papa et maman passent en revue la conception des bébés, l'acte d'amour "dont il ne faut pas avoir honte" et la naissance en tant que telle. Pour illustrer le propos, le disque est accompagné d'un livret de schémas très sommaires, mais ma foi fort utile.

Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai appris des choses, mais en tout cas, j'ai beaucoup ri.

L'extrait à écouter :


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jeudi 10 juillet 2008

Tu Fawning - Secession

Service clientèle

Commençons par une réflexion moralisatrice, une fois n'est pas coutume. A l'heure où Pascal Nègre se gratte le crâne dégarni en se demandant comment écouler ses stocks d'Emma Daumas et accuse l'oeil vengeur ces voyous du téléchargement, des labels au chiffre d'affaire affichant beaucoup moins de zéros n'ont jamais dû se poser la question.

Parce que, quelque part, il y a des nanas et des mecs qui ont compris qu'au XXIe siècle, on a beau vendre ses CD par internet, "l'humain" reste un facteur qui compte. Dans cette catégorie, Polyvinyl excelle. Systématiquement, quand je commande quelque chose chez eux, j'ai droit dans l'enveloppe à ce petit extra qui donne envie de continuer à leur acheter des CD par bateaux entiers. Un jour, ce sont des autocollants marrants ; un autre, c'est un CD sampler glissé en bonus. Si en plus, la musique est bonne, c'est carrément le pied. Et avec le dollar au plus bas, ça ne coûte pratiquement plus rien...

Samedi, je t'annonçais donc que le premier EP de Tu Fawning serait disponible à partir du 8 juillet. J'en profitais pour sortir la carte de crédit et y aller de ma commande.

Ce matin, soit le 10 juillet, le facteur déposait déjà le colis dans la boîte aux lettres. Deux jours pour arriver de Chicago, c'est du jamais vu ! Cette fois, deux surprises dans l'enveloppe : un carte contenant un code pin pour télécharger gratuitement une vingtaine de titres de leur catalogue (sympa, plein de choses que je ne connaissais pas en plus) et... une barre de pâte de fruit à la pomme. Alors ça, je ne m'y attendais pas.

Pour une fois, je vais critiquer : la pâte de fruit était dégueulasse. Par contre, l'EP de Tu Fawning est un régal. Six chansons mélancoliques, où s'entrecroisent les voix de Corrina Repp (qui rappelle parfois celle d'Alela Diane) et Joe Haege. Les deux univers (Corrina Repp et 31knots, pour ceux qui ne l'ont pas encore compris) se marient pour le meilleur et rien d'autre. Une guitare, des samples, un piano et je suis aux anges. Quand le projet n'était encore qu'à ses balbutiements, Joe le présentait comme "Portishead meets Edith Piaf". Tout y est. Sauf la tronche d'Alain Delon remettant le César à "la môme Marion".

Sur les 6 chansons, Out Like Bats et I'm Gone survolent, surclassent, surprennent, surnagent, c'est sûr. Mais les autres ne sont pas en reste. J'ai d'ailleurs toujours un peu de mal à me remettre du piano entêtant de In Silence, We Reached The Palisades.

[séquence "je m'écoute parler" sponsorisée par Abraham Simpson]:

Un jour, j'ai envoyé un mail à Joe pour lui demander s'il trouvait encore le temps de dormir entre ses deux sorties annuelles de 31knots et son nouveau projet. Sa réponse : "Je dors même beaucoup trop. Si j'avais un peu plus de temps et d'argent, je pourrais enfin me consacrer un peu à mon autre projet solo au piano." Après de longues recherches sur le net, j'ai trouvé le nom de ce projet : A Very Dead Horse, dont certains concerts explosifs ont attiré l'attention de quelque chroniqueur d'un canard local de Portland, Oregon.

A mon avis, certaines de ces compos de A Very Dead Horse ont dû influencer fortement les deux derniers morceaux de ce premier EP de Tu Fawning. La tension y est à son comble et pourtant, ça reste d'une beauté époustouflante, interpelante.

Je l'ai attendu longtemps cet album. Finalement, ce n'est qu'un EP. Comme je l'ai souvent dit (si, si, souviens-toi): mieux vaut un bon EP qu'un mauvais album. Mais ici, c'est vraiment du tout, tout bon. Du condensé de talent. Des putain de chansons.

Et pourtant, il n'y a pratiquement aucune chance pour que ce disque perce ailleurs que sur quelques blogs un peu bavards comme celui-ci. Malgré le sampler offert. Et malgré la pâte de fruit à la pomme.

Quelle drôle d'époque, mes enfants.

Salaud de Pascal Nègre.

Les liens :
www.polyvinylrecords.com
www.myspace.com/tufawning
Se foutre de la gueule de Pascal Nègre ici.

samedi 5 juillet 2008

Le Bota sur son 31 (et tellement d'autres choses que ça ne tiendrait pas dans un titre)


J'attendais ça depuis des années, des années. Je n'y croyais plus trop. Et puis un mail anodin dans ma boîte aux lettres :

20 septembre : 31knots + The Constantines (Botanique - Orangerie)

Alors, on se précipite sur son bel agenda en croco et on écrit en rouge dans la case 20 septembre : SOIREE RESERVEE.

Avec une rentrée pareille, l'été va nous paraître bien long. Mais pour patienter, un nouvel album sortira en août, le bien nommé Worried Well. Cooooool...

Comme si ça ne suffisait pas, pour nous mettre l'eau à la bouche, un extrait du nouvel album est déjà disponible sur leur page MySpace : Compass Commands. Attention les oreilles, c'est comme qui dirait un peu différent de ce qu'on avait pu entendre jusqu'à présent. A la première écoute, ça me paraît assez proche des délires d'un Danielson...

Mais attention parce que ce n'est pas fini. Tu Fawning, le nouveau groupe de Joe Haege et Corrina Repp, sortira son premier EP cette semaine sur Polyvinyl. Deux extraits sont toujours écoutables sur leur page MySpace, cette fois dans leur version définitive (j'avais été bien inspiré de pomper les démos). L'EP s'intitule Secession.

[Je crois que c'est mon post le plus excité depuis la création de ce site.]

PS : si ces infos ne t'intéressent pas, je te prierai de dégager de mon blog. Merci.

Les liens :
http://www.botanique.be/
http://www.31knots.com/
www.myspace.com/31knots
www.myspace.com/tufawning
http://www.polyvinylrecords.com/

Nick Cave and The Bad Seeds "at the Beeb"



Fidèle à la tradition, BBC Four a diffusé hier soir une session live exclusive de Nick Cave and The Bad Seeds. Le concert enregistré à St Luke's Church est disponible sur le site de la Beeb (en tout cas, il sera quand ils auront réparé le lien). En bonus pour les internautes : une interview du moustachu et trois morceaux live réservés pour le web : Into My Arms, Tupelo et Moonland.

Le tout, ou presque (mais ça ne saurait tarder) est à déguster ici.

Les liens :
Le site officiel : http://www.nickcaveandthebadseeds.com/
La Beeb : http://www.bbc.co.uk/

jeudi 3 juillet 2008

Coup de crayon : des pommes contre des poires


Je me répète, je le sais. Mais je commence vraiment à en avoir plein le dos des raccourcis journalistiques. On savait déjà que la présomption d’innocence ne faisait plus vendre, dont acte. Désormais, on a la preuve par A + B que la liturgie médiatique ne tolère pas la nuance. Mais ce n’est pas nouveau non plus.

Dans les rédactions, c’est comme dans les processeurs de nos ordinateurs : on réfléchit avec des 0 et des 1. Des pommes et des poires. Des chiens et des chats. Des noirs et des blancs. Donc quand j’entends ou lis dix fois par jour que
Barack Obama sera le premier candidat noir à la présidence des Etats-Unis, j’en attrape des cheveux gris (traduction pour le gratte-papier : des cheveux blancs).

1. Stigmatiser
Première raison de cette décoloration accélérée de la tignasse : la
stigmatisation. Comme pour tout être humain, on pourrait affubler le candidat démocrate de centaines de qualificatifs : jeune, progressiste, sensible aux questions environnementales, ouvert aux débats de société, prêt à remettre en question le modèle de développement américain, le premier à avoir mené une vraie campagne sur le net, etc. Libre à chacun d’adhérer ou pas à ses prises de position. Néanmoins, la première chose que le discours médiatique retient, c’est sa couleur de peau. Je ne vais pas nier la symbolique forte que représenterait son accession à la maison blanche, mais j’aurais espéré qu’on mette en avant d’autres aspects de sa candidature.

2. Simplifier
Deuxième raison de ce glissement vers le poivre et sel : la
simplification. Chaque jour qui passe démontre l’incapacité des journalistes à appréhender la complexification des sociétés humaines. Dire de Barack Obama qu’il est noir, c’est tout simplement une faute professionnelle. Métisse et symbole d’une Amérique multiculturelle, Obama est finalement aussi noir… que blanc. D’ailleurs, à se renseigner de plus près, on apprend qu'il a également des ascendances françaises, anglaises, néerlandaises, allemandes et irlandaises. Donc titrer « Obama, un candidat noir à la présidentielle » est aussi juste/faux que titrer « Obama, un candidat blanc à la présidentielle ». Je me demande d’ailleurs si des quotidiens de Kinshasa ou Libreville ont osé présenter la success story sous cet angle. Si Obama doit apparaître comme noir à mesyeux de blancs, il devrait être vu comme un blanc en Afrique noire.

On sent tout de suite qu’il y a quelque chose qui cloche. Mais pourquoi ça cloche ? « Parce qu’il n’est pas blanc ! » répondra le passant. Et alors ? Il n’est pas noir non plus. On bute ici sur les limites d’un journalisme médiocre et fainéant qui voudrait classer chaque observation du monde dans des catégories bien définies et mutuellement exclusives : les O et les 1, les pommes et les poires, les chiens et les chats, les blancs et les noirs.

Si je n’ai toujours pas entendu parler d’un fruit hybride (la poime ? la porre ?), je sais par contre qu’entre 0 et 1, il existe une infinité de chiffres qui suivent la virgule. De même, dans nos sociétés modernes, entre le blanc et le noir, il existe une infinité de nuances puisque personne n’a jamais pu me montrer ce fameux panneau qui, quelque part au milieu du continent africain, serait censé annoncer « Bienvenue chez les noirs ».

3. La pureté du blanc
Je ne doute pas qu’un jour, un éminent scientifique inventera une méthode pour mesurer la pureté de notre blancheur, exprimée en pourcent comme pour la pureté de la cocaïne. Je verrais bien un outil qui, comme ces bandelettes qui accompagnent certains tubes de dentifrice, déterminerait avec une précision prussienne le nombre d’étapes qui séparent un émail couleur charbon d’une dentition éclatante.

Reconnaître qu’il existe une infinité de variantes de noir, c’est admettre qu’il existe une infinité de variantes de blanc, que ces deux catégories se superposent et donc… qu’elles n’ont pas lieu d’être. On ne va pas refaire toute l’histoire, mais je tiens juste à rappeler qu’aucun scientifique n’a été en mesure jusqu’ici de prouver l’existence de différentes races humaines.

Mais alors, pourquoi les médias perpétuent-ils cette croyance populaire qui prétendrait que nous ne serions pas tous pareils ?

4. L’autre, ce salaud d’autre
Et là, j’en viens au point qui aura raison de tous mes cheveux :
l’ethnocentrisme. Ce qui est stigmatisé dans la prétendue négritude d’Obama, c’est moins sa couleur de peau que sa « différence ». Barack, c’est « the other », cette catégorie si bien caricaturée dans la série Lost et qui englobe également homosexuels, femmes, pauvres et handicapés. Bref, tout ce qui s’éloigne du modèle caricatural du leader charismatique occidental, forcément blanc, riche et aux dents soignées.

Résumer le succès du candidat démocrate à l’ascension d’un homme de couleur, c’est d’une condescendance post-colonialiste qui me rendra chauve d’ici la fin de l’année. Ce qui m’énerve, c’est cette arrogance qui, pour une fois, accorde la victoire aux dominés, aux plus faibles, aux sauvages. On l’apprécie parce qu’il est de « l’autre » camp et que, pour une fois, ce serait pas mal de laisser gagner « les autres », parce que finalement, ils l’ont bien mérité. Et au passage, on grave dans le marbre la domination de notre beau modèle blanc, que résume si bien l’acronyme américain
WASP (White Anglo Saxon Protestant).

Soutenir Obama, ça en devient presque de la charité chrétienne. C’est comme supporter la Suisse à l’Euro. Ils sont sympas, ils n’ont jamais rien gagné en foot et on commence à se fatiguer des victoires de l’Italie, de l’Allemagne et de la France. C’est comme voter pour le candidat bosniaque à l’Eurovision. Il a beau chanter comme une casserole et dans une langue totalement inconnue. Mais ce peuple a tellement souffert… accordons leur une petite victoire.

Bref, Barack Obama, moi j’aime bien. Parce qu’il a des idées, parce qu'il apporte un vent de fraîcheur, parce qu'il entraîne derrière lui un grand élan d'espoir. Parce que je me reconnais en lui. Le jour où ses idées m’agaceront, j’aimerais aussi pouvoir le dire avec autant d’assurance et ne pas devoir me taire pour ne pas froisser « les autres ».

Qu’il soit bleu outre-mer, vert bouteille, fuchsia ou jaune pipi, franchement, on s’en balance. Des quelques heures de science que j’ai suivies à l’école, je n’ai pratiquement rien retenu, sauf une chose : le noir n’est pas une couleur mais bien l’absence de couleur. Le blanc est par contre l’addition de toutes les autres. Voilà matière à réfléchir dans les rédactions…

Dessin : Mabi

Les liens

Le site officiel de Barack Obama : www.barackobama.com/

Yv(3), un autre convaincu : http://leblogdeyv3.wordpress.com/

Le site de Mabi : http://www.lesitedemabi.eu/

A ne pas rater : l'excellent (comme toujours) hors-série du Courrier International, la Révolution Obama. Non pas un portrait, mais des dizaines de portraits, nuancés, pour mieux cerner le candidat démocrate. Un must.

mardi 1 juillet 2008

Kiss my ass

Métaux lourds

La presse rock, c'est le contraire de la clope. La clope, on essaie désespérément d'arrêter et on souffre. La presse rock, j'essaie de m'y remettre mais je n'y arrive pas.

A peu près une fois par an, j'achète un Rock'n'Folk qui s'était dressé sur mon chemin au moment où j'avais voulu payer mes deux Win For Life. Cette année, le couperet est tombé début juillet.

En général, ce qui influence mon achat, c'est la présence d'un CD, "les morceaux qu'il faut avoir entendus pour garder la cool attitude cet été." Et la plupart du temps, j'écoute deux fois ledit CD avant de le ranger sur l'étagère "erreurs de jeunesse".

Au sommaire ce mois-ci, une interview fleuve de Kiss, 35 ans de rock et de mascara au compteur. De Kiss, je ne connaissais pas grand chose à part un ou deux tubes de rock FM et bien évidemment les super maquillages qui trônent sur leurs torses velus. Néanmoins, la couverture a suscité chez moi une profonde curiosité : tout à coup, j'avais envie de partager la passion de la Kiss Army, de comprendre ce qui anime cette communauté de fans qui a acheté leurs albums par millions. Et - pourquoi pas ? - de m'offrir un vieil album de ces papys du rock à l'occasion.

Quelle déception...

Malgré les multiples manoeuvres de Philippe (mouhaha) pour tirer quelque chose de valable des becs de Paul Stanley et Gene Simmons, on doit se contenter d'un ramassis d'inepties, baignant dans une arrogance qui ferait passer Justine Hénin pour l'Abbé Pierre.

Les deux clowns s'obstinent à répondre à côté des questions, à répéter qu'ils sont beaux, qu'ils sont le meilleur groupe de l'histoire, qu'ils ont vendu des millions d'albums et qu'ils tourneront encore dans 50 ans. Au passage, ils rappellent plusieurs fois que la France n'a jamais rien sorti de musicalement intéressant. Avec une certaine fierté, ils martèlent même que Daft Punk serait totalement inconnu en dehors des frontières de l'Hexagone. Ben tiens...

Moi qui pensais élargir ma palette musicale avec Kiss, je me retrouve devant deux bouffons en semelles compensées et plastrons à froufrous.

J'ai quand même appris une chose en lisant cette interview : la typo qui a servi à dessiner le logo de Kiss a été réalisée à la main, ce qui explique que la base des deux "S" soit légèrement différente. Je n'avais jamais remarqué ce détail.

Par contre, il y a toujours une question qui me turlupine à propos de Kiss : le double SS final, dans sa typo, évoque toujours chez moi une époque où certains se sentaient un peu à l'étroit outre-Rhin. Hasard, simple coïncidence ou mauvais goût ostensible ? J'avoue que je n'ai jamais pris la peine de chercher la réponse à cette question. Alors si tu peux éclairer ma lanterne...

[Off the record : dans ce même dossier sur Kiss, Rock'nFolk balaie les icônes rock qui se sont aussi laissé tenter par le grimage outrancier et/ou les déguisements à paillettes, de Bowie à Gwar, des Béru à Cradle Of Filth. Dommage qu'ils aient oublié la version "adulte" de Kiss : les doux agneaux d'Immortal]