dimanche 7 décembre 2008

Jean-Philippe Querton - L'Homme à la Chimay bleue


Malgré son titre alléchant, ce que nous conte Jean-Philippe Querton n’a rien d’une belle histoire. On y suit la rapide déchéance d’un homme d’un âge certain qui, après les mises en garde de son médecin (« A ce rythme-là, il vous reste cinq mois à vivre »), décide de profiter à fond de ses derniers instants. Il s’exile dans un bled de campagne, y loue une chambre et précipite sa chute à l’aide de la plus belle des armes : la Chimay bleue.

Chaque matin, il prend place au bistrot du coin et écluse les trappistes les unes après les autres. Les premiers jours de ce périple au fond d’un verre de 33 cl fournissent à l’auteur un excellent prétexte pour évoquer sa passion pour les mousses onctueuses :

"La troisième bleue est souvent la meilleure. (…) Le palais est absorbé par le parfum du breuvage, la finesse de son bouquet régale les papilles qui ne sont pas encore anesthésiées par l’alcool.

La troisième, il faut la faire durer.

La savourer.

Chez moi, c’est le moment où se diffusent dans mon corps et mon esprit les effets stupéfiants de la boisson.

Un bien-être m’envahit, une sensation de sérénité me submerge, ma perception de la réalité se modifie.

Le monde qui m’entoure s’embellit.

Il faudrait commencer par la troisième et terminer par la troisième."

Comme on s’en doutait, la relation à la bière passe rapidement du plaisir au besoin maladif. Notre vieil ami sombre ainsi progressivement dans son propre vice et passe du stade de buveur jovial à celui de poivrot pathétique et répugnant. Adieu les belles phrases sur les réjouissances gustatives, voici venu le temps de la douleur, des spasmes, de l’odeur d’urine, des taches de vomi sur la chemise et des réveils pâteux arrosés de matière fécale.

Au bout du tunnel, le vieil homme fait toutefois une rencontre inattendue qui pourrait le remettre sur les rails. Sauf que…

Sauf que, sans flinguer la fin pour autant, on peut dire que l’auteur n’avait vraiment pas envie d’un happy end. Au moment où le pochard semble enfin avoir retrouvé goût à la vie, c’est peut-être celle-ci justement qui va l’achever : violence, perversion, crimes et vengeance se bousculent dans les dernières pages de ce récit étonnant qui laisse le lecteur KO face à tant d’atrocités.

Ce qui semblait être une réflexion sur la solitude et le suicide se mue finalement en une fable terrible, réduisant l’homme à une bête.

Fascinant et perturbant.

Les liens:

http://www.editionschloedeslys.be/

http://chloedeslysblog.canalblog.com/

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