L'uppercut
Les disques sont parfois comparables au vin. L'étiquette peut être trompeuse. La robe peut être d'un rubis éclatant, mais le premier nez décevant. Le rosé de Provence ne ment jamais sur la marchandise : il s'appréciera sous un soleil de plomb mais ruinera le meilleur des gigots d'agneau. A l'inverse, il y a les piquettes qui se voudraient nectars, mais qui, dès le premier verre, se révèlent d'une banalité affligeante. C'est clairement le cas du dernier album de CocoRosie, par exemple, tellement insipide que je ne suis toujours pas parvenu à l'écouter jusqu'au bout. Du pur Château Dafalgan.
A l'instar des meilleures bouteilles, certains disques demandent quelques années pour mûrir et révéler toute leur puissance. On est ainsi parfois étonné de rester scotché à l'écoute d'un CD qui traînait depuis des années sous une pile de vieux magazines. L'aventure m'est arrivée récemment en me replongeant les oreilles profondément dans House OF Gvs.B de Girls Against Boys ou Outside The Simian Flock de Millionnaire. C'était déjà vachement bien à l'époque, mais c'est encore mieux maintenant.
Puis, il y a les tous grands crus, ceux qui ne laissent aucun doute plâner sur la valeur du produit. C'est cette catégorie qui nous intéresse avec ce quatrième album de The National. Ici, nul besoin d'afficher une médaille d'or reçue à la Foire aux Vins de Limoges. A peine débouchée, la boisson libère un bouquet divin. Dès la première lampée, on sait qu'on touche à la perfection. La souplesse du breuvage vous titille les sens à chaque gorgée, dévoilant des saveurs subtiles insoupçonnées. L'équilibre en bouche tient de l'exercice de haute voltige. C'est la toute grande classe, le vin des rois.
On l'aura compris, Boxer m'a touché en plein coeur, avec ses chansons simples en surface, mais d'une incroyable richesse dès qu'on y tend une oreille plus attentive. Des arrangements méticuleux, faussement basiques, confèrent à ce disque une couleur d'ensemble qui se vit mais ne s'explique pas. L'écoute de la musique reste une expérience très personnelle, qui provoque des sensations parfois difficiles à relater. Je dirais bien que j'y perçois de ci de là de légères touches de Tindersticks. Mais c'est tellement subjectif que je ne voudrais même pas insister là-dessus. Je n'ai donc qu'un conseil à vous donner : ruez-vous de toute urgence sur Boxer. Si vous hésitez, allez écouter des titres comme Brainy et sa tension dissimulée derrière ses guitares sagement dosées ou le folk mélancolique de Start A war. Chacun en pensera ce qu'il voudra, mais moi, je suis en pleine extase.
Liens intéressants :
Le site officiel : http://www.americanmary.com/music/
Sur MySpace : http://www.myspace.com/thenational
La Blogothèque ne tarit pas d'éloges sur The National : ça se passe ici et ici (et ailleurs également).
The National jouera cet été à Dour et à Herk De Stad (gratuit).
3 commentaires:
c'est rigolo ça, je suis justement en train de réécouter house of gvsb
tiens, puisque t'en parles plus bas, je trouve que le morceau "mistaker for stran..." a un côté interpol réussi avec sa ligne de basse (autant que les enceintes pourries de mon ordi me permettent de me rendre compte) à la joy division. Je délire ?
t'as pas tort. Si Interpol avait conservé un minimum d'imagination après le 1er album, ils seraient sans doute en train de faire du The National maintenant.
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